Daniel Favier nous reçoit à la Briqueterie, lieu de production dédié à la danse, pour une visite nocturne de cette institution artistique qui a hérité du patrimoine industriel de Virty-sur-Seine. À l’étage, dans le grand studio, la compagnie Toujours après minuit répète son prochain spectacle.

Vendredi soir, Daniel Favier, directeur de la Briqueterie CDCN, nous fait visiter ce lieu de production dédié à la danse. Derrière lui, dans la coursive du premier étage, une exposition sur les friches culturelles d’Île-de-France. À la briqueterie, installée dans une ancienne usine de Vitry-sur-Seine, patrimoine industriel et pratiques artistiques se rencontrent.
Fondée en 1868, sur un ancien parc de château, la « Briqueterie de Gournay » est restée active jusqu’en 1966. Accueillant des ouvriers de l’Europe entière, elle a contribué à l’expansion de Paris et de sa banlieue, jusqu’à ce que le parpaing remplace la brique. Après avoir été investi de manière temporaire par la société Mécalix, le bâtiment tombe en friche jusqu’à ce que Michel Caserta, directeur de la Biennale de danse du Val-de-Marne, décide de le transformer en Centre de développement chorégraphique national (CDCN). C’est l’architecte Philippe Prost qui se charge de sa réhabilitation. Les murs de brique et la cheminée sont conservés et augmentés d’une structure de verre et d’acier qui ouvrent de larges coursives sur les côtés. Trois studios de répétitions, un studio-scène, un jardin paysager et un théâtre de plein-air sont aménagés. Le lieu du travail ouvrier se change en lieu de travail artistique où les compagnies de danse viennent répéter avant de se produire en France et dans le monde entier.
Ce soir, dans le grand studio, Brigitte Seth et Roser Montlló Guberna, qui dirigent la compagnie Toujours après minuit, nous présentent un extrait de leur spectacle qui se jouera au Théâtre de Chaillot en janvier. Il s’agit d’une adaptation théâtrale et chorégraphique d’Américains d’Amérique de Gertrud Stein, rebaptisé Family Machine. L’histoire sur trois générations d’une famille ayant émigré aux États-Unis. Sur scène Brigitte Seth incarne Gertrud Stein, elle nous raconte la longue marche de ses ancêtres migrants à travers le désert. Les danseurs qui représentent les membres de la famille parcourent le plateau, accrochés les uns aux autres, comme les profils d’une frise. Entre la statuaire et la danse, ils composent un monument mobile et vivant. Trois générations : grands-parents, parents, enfants, c’est le temps que nous passons ensemble sur terre. Pour nous qui faisons le Grand Tour du Boulevard des Arts, l’histoire de l’Amérique qui peut sembler lointaine résonne avec celle des habitants des villes que nous traversons, de passage pour un temps sur un territoire en mutation.